135e congrès, Neuchâtel, 2010 - Paysages

jeudi 8 avril 2010 - 09:00


Thème 3 - Paysage identitaire, paysage patrimonial

Sous-thème : 3.3 - Marketing territorial et paysages touristiques

Chapitre : La mise en scène touristique des paysages

Titre : Comment faire d'un « désert » un paysage ? L'île de Vassivière entre rêves d'architectes et aménagement touristique

Président : TISSOT Laurent, professeur à l'Université de Neuchâtel, président du Comité international pour l'histoire du tourisme et du voyage

L'île de Vassivière, située au centre du lac du même nom dans un territoire rural de moyenne montagne à la démographie très faible, fait l'objet depuis plus de dix ans d'un double effort concerté d'aménagement paysager et touristique. D'un côté, elle a vu se construire un Centre international d'art et du paysage, dont les activités sont essentiellement orientées vers des travaux sur le paysage, et l'intégration de l'art dans celui-ci. Les artistes qu'il accueille sont invités à développer « des projets questionnant et intégrant la notion de paysage, désigné comme un sujet d'étonnement perpétuel ». Le bâtiment du CIAP se veut lui-même un exemple d'architecture intégrée, qui n'accueille pas seulement des oeuvres à l'intérieur de ses murs mais veut également rayonner sur toute l'île : l'existence d'un parc de sculptures de plusieurs dizaines d'œuvres à ses abords immédiats, mais aussi la récente transformation de l'île toute entière en un territoire imaginaire, attestent de cette réflexion expérimentale. Parallèlement, l'île et ses alentours font depuis peu l'objet d'une opération conséquente de marketing territorial visant à promouvoir un « tourisme du merveilleux », à laquelle s'ajoutent des travaux ou projets d'aménagement relevant eux aussi d'un travail expérimental d'architecture intégrée au paysage. L'espace est peu à peu rendu conforme à l'image qui en est vendue : l'île est transformée en un territoire magique, un jardin merveilleux entièrement aménagé pour offrir au visiteur repos et contemplation. La population des bourgs environnants, dont les principales activités sont l'agriculture et la sylviculture, a ainsi vu se développer sur son territoire, appréhendé comme un désert propice à l'expérimentation, une puissante logique d'aménagement paysager sans aucun lien avec le rapport qu'elle entretenait avec celui-ci. L'objet de cette communication, appuyée par une enquête auprès de la population des bourgs entourant le lac, sera de présenter les effets sociaux de cette création paysagère qui, selon nos premiers constats, suscite des réactions très diverses et souvent conflictuelles ; et par là, de s'interroger sur les logiques sociales à l'oeuvre dans la construction des paysages.

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M. Antoine VEYRIRAS, Doctorant en sociologie à l'université de Limoges