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12/09/2022 - Remise du prix CTHS - Bulles d'Humanité
La remise du quatrième prix CTHS/Bulles d'Humanité a eu lieu ce week-end à l'occasion de la Fête de l'Humanité. Ce prix récompense un ouvrage historique et citoyen, et permet de diffuser un savoir universitaire auprès d'un nouveau public. Jean Dytar est le nouveau lauréat avec #J'accuse (Delcourt éditions), ouvrage dans lequel l'auteur propose une relecture de L'affaire Dreyfus à travers le prisme des réseaux sociaux.
# J’accuse !
Livre-objet, livre objectivé Chez Jean Dytar, le style ne fait pas l’homme, mais le récit. Dessinateur talentueux, il ne recherche pas un trait qui l’identifierait, mais l’adapte au contraire, avec maestria, au fond dont il est le rédacteur non moins libre et savant. Miniaturiste avec Le Sourire des marionnettes (2009), aquarelliste avec Florida (2018), il est tout aussi à l’aise, son récit tout aussi dense, avec une Perse mythifiée qu’avec la conquête de la Floride par les protestants, ou la Venise de la Renaissance dans La Vision de Bacchus (2014). Fortement attiré par l’histoire, elle n’est jamais chez lui désincarnée, offrant une réflexion ici sur la formation et le statut de l’artiste, là sur la fragilité de la raison et de l’érudition dans une théocratie, ailleurs sur les promesses et les mensonges de la colonisation. C’est en souhaitant traiter de l’écosystème médiatique contemporain qu’il en venu à s’intéresser à l’Affaire Dreyfus, se demandant jusqu’où elle aurait pu aller à l’heure des réseaux sociaux. À partir de 1894, elle a progressivement divisé la société, la vie politique françaises de la IIIe République, et a laissé des stigmates bien au-delà. Elle a fait jaillir, à travers le cas particulier du capitaine Alfred Dreyfus, injustement accusé d’espionnage par sa hiérarchie, les méfaits et l’ampleur de l’antisémitisme. Il a fallu toute la conviction et l’énergie de Mathieu pour faire revenir son frère de sa déportation et obtenir la révision du procès : la mobilisation, à terme, d’intellectuels comme Zola, d’élus comme Clémenceau et Jaurès, les campagnes de presse ont bâti, non sans risques individuels, une opinion « dreyfusarde ». Elle a fort à faire avec la puissante manipulation « antidreyfusarde » qui pervertit une majorité des journaux et l’ensemble des institutions, jusqu’au plus haut sommet de l’État. L’opinion passe de l’addiction aux surenchères médiatiques à la lassitude, ce qui renvoie aux temps présents et à l’information en continu. Dytar, durant deux ans, a plongé avec un sérieux d’historien dans des sources nombreuses et contradictoires : journaux, mémoires, photographies, synthèses historiques, etc. Le lecteur trouvera tous les éléments du dossier sur le site de l’éditeur, comme y incitent nombre d’onglets : les dates, les noms qui interpellent peuvent ainsi amener à des excursions savantes. En noir et blanc, avec une belle unité graphique donnée à des documents très différents, le dessin évoque les articles de presse, les dessins et caricatures contemporains de l’Affaire, met en scène les procès ou les débats à la Chambre. Certains détournements sont assumés. Les attitudes de quelques intervenants, et notamment des journalistes, sont parfois calquées sur la gestuelle des porteurs de haine actuels - Barrès a des airs de Zemmour. Ce livre-objet broché, au format à l’italienne, enfermé dans un élégant coffret frappé d’un doigt accusateur, s’ouvre sur un clavier, et la bande dessinée est projetée en lieu et place d’un écran d’ordinateur, illusion d’une interactivité. La lecture de ce documentaire sans voix off, qui multiplie les jeux d’échelle et croise les interventions des camps opposés, est dense, exigeante, haletante. Chaque page est sourcée, a son unité, pour créer un tempo de lecture. Dytar porte très haut le neuvième art. Il en démultiplie les potentialités et la force du discours. Philippe Bourdin Jean Dytar, # J’accuse ! Paris, Delcourt, 2021, 312 p., EAN : 9782413015864, 29€95 pour la version papier, 19€99 pour la version numérique.