141e congrès, Rouen, 2016 - L'animal et l'homme

mercredi 13 avril 2016 - 14:30


Table ronde des sociétés savantes - Archives départementales de la Seine-Maritime - Pôle Grammont
Titre : Du Comité de liaison des sociétés historiques et archéologiques de Normandie au Secrétariat permanent des congrès

Présidents :
BLARY François
, professeur d’histoire de l’art et d’archéologie du Moyen Âge à l’université libre de Bruxelles, membre du CReA-Patrimoine (Centre de recherche en archéologie et patrimoine) de la Faculté de philosophie et de lettres et de l'équipe TrAme (Textes, représentations, archéologie, autorité et mémoire de l'Antiquité à la Renaissance), EA 4284 de l'université de Picardie Jules-Verne
BIARD Michel , professeur d'histoire du monde moderne et de la Révolution française à l'université de Rouen, directeur du GRHis (Groupe de recherche en histoire), EA 3831

A-La création du Comité de liaison des sociétés historiques et archéologiques de Normandie
Il faut chercher les origines du Comité de liaison dans les congrès nationaux organisés après la seconde guerre mondiale. L'idée fut lancée de susciter des congrès régionaux et, pour la Normandie, le 81e congrès qui se tint à Caen en 1956 fut un évènement exemplaire, une occasion privilégiée de rencontres entre universitaires, archivistes et érudits locaux.
André Dubuc, dont le talent avait été remarqué par Marc Bloch dès les années 1930, était déjà un chercheur chevronné. Cet instituteur originaire du pays de Bray présenta une communication intitulée Les annonces, affiches et avis divers de la Haute et de la Basse Normandie qui lui valut l'estime des professeurs de l'université de Caen comme Jean Vidalenc, ou Lucien Musset et des archivistes comme Marcel Baudot. Sa notoriété ne fut pas seulement normande car il participa les années suivantes à tous les autres congrès nationaux de 1956 à 1985. Chaque année, il préparait une conférence et il intervenait lors des forums, se faisant le défenseur et l'illustrateur de l'histoire locale.
Sa participation aux congrès fut pour lui une véritable religion. Les congrès du CTHS des années 1960 allaient favoriser l'émergence des fédérations régionales des sociétés savantes. On en parlait lors des forums, à Annecy en 1960, à Montpellier, l'année suivante, à Nice en 1965 lors du 90e congrès. Des mutations profondes liées à la régionalisation, à la création de l'université de Rouen, au dynamisme des sociétés savantes furent autant de facteurs favorables qui conduisirent à la création du Comité de liaison.
Le 20 octobre 1965, sur l'initiative d'André Dubuc et de François Burckard, une poignée de chercheurs habitués des congrès nationaux ou responsables de sociétés savantes de Normandie participèrent à la réunion de fondation du Comité de liaison qui se déroula dans la salle Lanfry des Archives départementales de la Seine-Maritime.
François Burckard et Marcel Baudot représentaient les archivistes des deux départements, Lucien Musset et Jean Vidalenc les professeurs de l'université de Caen. Les sociétés savantes de Caen, Le Havre, Dieppe et Rouen étaient représentées par René Bruneau, Philippe Manneville, Roger Barré, André Dubuc et Lucien Andrieu. L'idée d'une fédération des sociétés savantes fut écartée car André Dubuc s'y opposa fermement. On se mit d'accord pour organiser un Comité de liaison dont l'objectif était d'organiser un Congrès des sociétés savantes de Normandie à Rouen en 1966. Les trois composantes de ce comité (universitaires, archivistes et érudits locaux) définirent alors les grandes lignes de l'organisation scientifique de la manifestation : un thème illustré par une conférence magistrale, des communications regroupées de manière chronologique, des visites et excursions. L'organisation matérielle, la comptabilité furent confiées à la Société libre d'émulation de la Seine-Maritime, plus particulièrement à Lucien Andrieu. Le comité portait bien son nom. Ce n'était pas une association régie par la loi de 1901 mais, sur le plan juridique, une simple émanation de la Société libre d'émulation de la Seine-Maritime.
B- Le succès des Congrès organisés par le Comité de liaison
Ce premier Congrès de 1966 connut un véritable succès. Des chercheurs anglais participèrent à ces deux journées car le thème choisi (les rapports entre la Normandie et l'Angleterre) les concernait directement de même que la conférence grand public donnée par Michel de Boüard consacrée à Guillaume le Conquérant. On compta vingt-quatre communications et plus d'une centaine d'auditeurs.
Publier les Actes de ce congrès parut une obligation. On put réunir la plupart des textes mais le financement ne suivit pas. La Société libre d'émulation avait renoncé à publier son Bulletin annuel en 1953 ; elle ne pouvait jouer un rôle moteur pour la publication des Actes et les différentes associations qui avaient participé à la réussite du congrès n'envisagèrent pas de participer financièrement en totalité ou en partie à l'impression des Actes de ce premier congrès.
Par contre, le succès de 1966 en appelait d'autres et le Comité de liaison assura l'organisation des congrès des vingt années suivantes. Dans chacun des cinq départements normands, on choisit d'autres associations, d'autres villes et d'autres thèmes. Le congrès se tint ainsi à Evreux, au Havre, à Caen, à Louviers, à Dieppe, à Alençon, à Lyons-la Forêt et à Valognes. Le Xe congrès se déroula à nouveau à Rouen. L'organisation était bien rodée mais la croissance posa des problèmes car la durée passa de deux jours en 1966 à trois, puis quatre et cinq jours. Le nombre de communications doubla. Le problème récurrent de la publication des Actes devenait insoluble. Comment publier près de cinquante articles en l'absence d'un comité de rédaction ? Comment financer un tel ouvrage par le comité qui pouvait difficilement obtenir des subventions puisqu'il n'avait pas de statuts ? Un grand nombre d'articles du Ve congrès, tenu à Louviers en 1970, furent publiés en 1975 par la Société libre d'émulation de la Seine-Maritime. Il s'intitulait Le textile en Normandie. Le sous-titre Études diverses montrait que l'ouvrage n'avait pas retenu toutes les communications du congrès de Louviers et que l'on avait adjoint des articles d'origine diverse. Le décalage entre la date du congrès et celle de la publication montrait bien les difficultés presque insurmontables à réunir et financer de tels ouvrages.
C- La création du Secrétariat permanent des congrès 1985
Au début des années 80, deux évènements vont permettre de faire évoluer la situation. André Dubuc n'est plus président de la Société libre d'émulation depuis 1982. Il a favorisé le rajeunissement du bureau et de l'équipe dirigeante. J'ai donc été élu président, Yannick Marec secrétaire et Francis Concato, trésorier. André Clastot, Jacqueline Goube, Lucien Andrieu, Georges Guérif, et les deux anciens présidents René Rouault de la Vigne et André Dubuc complètent le bureau et apportent leur soutien aux initiatives des jeunes chercheurs dont ils ont favorisé l'élection. On décide de publier à nouveau un Bulletin, de proposer un concours et un programme de séances mensuelles. On s'inscrit également dans la continuité en participant aux congrès nationaux du CTHS et régionaux du Comité de liaison.
Le 23 mai 1984, le décès de Lucien Andrieu porta un coup fatal à l'organisation du Comité de liaison. Si André Dubuc en était le porte-parole, Andrieu en était lui la cheville ouvrière depuis 1966. André Dubuc me remit le livre de caisse commencé en 1979. J'héritais d'un problème délicat. L'avenir du Comité de liaison se posait. Ma situation personnelle me plaçait à la croisée des chemins. Depuis deux ans, j'étais le président de la Société libre d'émulation et l'ami d'André Dubuc et du regretté Lucien Andrieu. Je connaissais bien les Archives départementales de la Seine-Maritime car j'avais été nommé professeur chargé du service éducatif. Je préparais une thèse sous la direction de Jean Vidalenc et j'étais membre de plusieurs sociétés savantes. J'avais participé à plusieurs congrès. Lors de la réunion du Comité de liaison à l'automne 1984, il fut décidé de créer une association placée sous le régime de la loi du 1er juillet 1901. La rédaction des statuts ne posa pas de problème. Il s'agissait simplement d'officialiser le système qui avait été mis en place en 1966. Le titre demanda réflexion. Certains songeaient à utiliser le mot « fédération » ; d'autres souhaitaient conserver l'expression « Comité de liaison ». Je n'ignorais pas quel était le souhait d'André Dubuc. Finalement, il fut décidé de retenir une autre expression qui fut Secrétariat permanent des congrès des sociétés historiques et archéologiques de Normandie. Les archivistes des cinq départements normands et un professeur d'histoire des universités de Caen et de Rouen étaient membres de droit. Les associations historiques et archéologiques de Normandie étaient membres titulaires à condition d'adhérer aux statuts et de payer une cotisation annuelle. Le but était l'organisation des congrès, la publication des actes et la « liaison » entre les sociétés. Les statuts, officialisés le 24 mai 1985, donnèrent un nouvel élan au congrès de Rouen. J'avais été élu président du Secrétariat permanent et Philippe Manneville, trésorier, Vivienne Miguet, archiviste, assurant le secrétariat de la nouvelle association. Les formalités d'ouverture d'un livret de Caisse d 'épargne et d'un compte CCP furent réglées rapidement. Je pus alors gérer le transfert des avoirs du Comité de liaison sur ces nouveaux comptes. Le Secrétariat permanent trouva donc dans sa corbeille de baptême la coquette somme de 28 000 francs. La nouvelle association s'empressa de demander des subventions à la ville de Rouen et au Département pour la tenue du XXe congrès programmé du 3 au 7 septembre. L'année 1985 fut mémorable à plusieurs titres. Pour la troisième fois, le congrès se déroulait à Rouen. Président de la Société libre d'émulation de la Seine-Maritime, j'assurais pendant quelques mois la direction du Comité de Liaison dont je fus le liquidateur avant d'être élu président du Secrétariat permanent des congrès des sociétés historiques et archéologiques de Normandie. J'eus également à déplorer l'absence d'André Dubuc. Certains pensèrent qu'il boudait le congrès parce qu'on avait transformé le Comité de Liaison en Secrétariat Permanent. Il n'en était rien. Il avait même prévu de donner une conférence mais il était souffrant. Les congrès perdaient un chercheur de talent, l'un des animateurs les plus assidus de ces manifestations.
Une nouvelle époque commençait. En effet, le second objectif du secrétariat, la publication des Actes, devint une réalité. L'ouvrage Protestants et minorités religieuses en Normandie parut en 1987 grâce au travail remarquablement efficace de Vivienne Miguet, alors conservateur adjoint des Archives départementales de la Seine-Maritime. Elle réunit l'ensemble des textes, les harmonisa et corrigea les épreuves. Ce beau volume de 374 pages édité par la Société libre d'émulation et le Secrétariat permanent est toujours en vente aujourd'hui. Un nouvel épisode commençait. Désormais, on allait pouvoir organiser les congrès mais également en publier les Actes.

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M. Daniel FAUVEL, Professeur retraité

Membre des sociétés savantes :
Amis de Flaubert et de Maupassant, Président d'honneur
Consortium des sociétés savantes de la Seine-Maritime, Secrétaire
Société centrale d'agriculture de la Seine-Maritime, Membre
Société libre d'émulation du commerce et de l'industrie de la Seine-Maritime, Président