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Histoire du CTHS
« Peu d’institutions ont subi plus de changements. Depuis son origine, le Comité a vu son nom, sa composition et ses attributions si souvent modifiés, qu’il est quelquefois difficile de se reconnaître au milieu d’un nombre aussi considérable d’évolutions. Néanmoins, les états divers par lesquels il a passé n’ont point été des accidents fortuits ; ils ont été au contraire les effets successifs d’un développement régulier, normal, nécessaire, qui prouve en même temps combien était juste l’idée à laquelle il doit sa naissance, et combien cette idée, largement interprétée, pouvait aisément se prêter à tous les progrès. L’histoire du Comité des travaux historiques et scientifiques se confond, en quelque sorte avec l’histoire même de l’érudition ; elle en suit tous les développements et tous les progrès. »Xavier Charmes, 1883
Le 18 juillet 1834 fut créé, par arrêté ministériel, un comité chargé de « diriger les recherches et les publications de documents inédits à l'aide de fonds votés au budget de l'État ». Il était composé de Villemain, Daunou, Naudet, Guérard, Mignet, Champollion-Figeac, Fauriel, Vitet, Desnoyers et Granier de Cassagnac, Fallot en était le secrétaire.
Guizot avait créé, l'année précédente avec 19 autres historiens la Société de l'histoire de France, dans une période animée d'une véritable passion pour l'histoire. Les sociétés savantes, dissoutes pendant la Révolution se réorganisaient et se tournaient, pour les plus actives d'entre elles, vers les méthodes anglo-saxonnes qui avaient pris de l'avance sur la recherche française. Il fallait alors impulser, coordonner et financer les recherches, éditions de textes, sauvegarde du patrimoine architectural, constitution d'instruments de travail relevant d'un projet global. Dans son rapport au Roi, du 31 décembre 1833, il présentait ses intentions : « Au gouvernement seul il appartient, selon moi, de pouvoir accomplir le grand travail d'une publication générale de tous les matériaux importants et encore inédits sur l'histoire de notre patrie. Le gouvernement seul possède les ressources qu'exige cette vaste entreprise. »
Dès le 10 janvier 1835, un second comité fut institué, chargé de concourir à la recherche et à la publication des monuments inédits de la littérature, de la philosophie, des sciences et des arts considérés dans leurs rapports avec l'histoire générale. Il était composé de Victor Cousin, Vitet, Le Prévost, Mérimée, Victor Hugo, Lenormand, Albert Lenoir, le secrétaire était Didron. Il fut doté d'un budget de 120.000 francs pour ses recherches et publications. Un bureau des Travaux historiques fut créé par Hippolyte Royer-Collard au sein de la division des sciences et lettres du Ministère pour gérer les comités. Le service des missions, décidé quelques années plus tard lui fut rattaché jusqu'en 1935, date à laquelle il fut transféré à la Caisse de la recherche scientifique.
Le 23 juillet 1834, dans une lettre aux sociétés savantes, Guizot présentait le Comité nouvellement créé et instituait les premiers rapports entre eux : « Il faut que les sociétés savantes reçoivent du gouvernement, protecteur naturel de l'activité intellectuelle aussi bien que de l'activité matérielle du pays, un encouragement soutenu, que leurs travaux soient effectivement portés à la connaissance du public. » Il proposa alors des relations régulières avec elles, et des publications des mémoires les plus importants.
Le 27 novembre 1834, dans un rapport au Roi qui ressemble à une lettre de mission, le Comité fut chargé de surveiller, de diriger tous les détails de cette entreprise : recueillir, examiner et publier s'il y a lieu tous les documents inédits importants dans les domaines historiques, mais aussi philosophiques, littéraires ou d'histoire de l'art. 87 correspondants, membres de sociétés savantes provinciales, furent nommés auprès du Comité. Munis d'instructions générales précises, ils devaient commencer les travaux de recherche et d'organisation des documents dans les archives et les bibliothèques.
Sainte-Beuve fut chargé d'un rapport général sur l'histoire littéraire de la France. Augustin Thierry mit en route le recueil des Monuments du tiers état. Michelet, quant à lui, entreprit une enquête sur les archives et les bibliothèques des départements du Sud-Ouest (Granier de Cassagnac se chargea du Midi de la France). Edgar Quinet proposa de travailler sur les bibliothèques allemandes et Francisque Michel sur les bibliothèques anglaises. À la fin de 1835, 135 correspondants étaient à pied d'œuvre en province et 12 pour la seule bibliothèque royale.
En 1837, Narcisse de Salvandy, nommé ministre de l'Instruction publique, membre de l'Académie française, reprit le programme de Guizot en reliant le Comité à l'Institut. Il créa donc cinq sections reliées à celles de l'Institut :
- le Comité de la langue et de la littérature, présidé par Villemain avec Sainte-Beuve, Charles Nodier, Jules Michelet, Charles-Claude Fauriel, Alfred de Wailly ;
- le Comité de l'histoire positive et des chroniques, chartes et inscriptions, présidé par Antoine-Isaac Silvestre de Sacy avec Joseph Naudet, Benjamin Guérard, Jacques-Joseph Champollion-Figeac, Jules Desnoyers, Francisque Michel ;
- le Comité des sciences présidé par Louis-Jacques Thénard assisté de François Arago, Eugène Chevreul, Antoine-Laurent de Jussieu, Louis-Joseph Gay-Lussac, Geoffroy Saint-Hilaire ;
- le Comité des arts et monuments, présidé par Paul-Joseph de Gasparin avec Arcisse de Caumont, Prosper Mérimée, Albert Lenoir ;
- le Comité des sciences morales et politiques, présidé par Victor Cousin assisté de François-Auguste Alexis Mignet, du Comte de Laborde et d'Alexis de Tocqueville.
Les nouveaux statuts prévoyaient l'autonomie des sections quant aux choix des travaux et à la désignation des directeurs de publications. Toutefois deux projets éditoriaux étaient inclus dans les propositions communes : la préparation d'une statistique monumentale de la France ainsi que la publication d'un dictionnaire et d'un manuel de paléographie ajoutant donc à la recherche la publication d'instruments de travail. Les membres du comité avaient également pour tâche de donner leur avis sur tous les ouvrages qui devaient recevoir une aide du ministère.
A partir de 1838, une bibliothèque fut constituée, comprenant bien sûr les ouvrages publiés mais aussi tous les manuscrits, dessins, relevés envoyés au Comité. Les publications des sociétés savantes furent demandées à maintes reprises, et étaient inclues à cette bibliothèque. Le Comité ne se chargeait pas uniquement de recevoir et d'éditer les travaux, il guidait et regroupait les recherches. Un nombre important de questionnaires et d'orientations de recherches furent envoyés par les différentes sections, à l'instar du questionnaire archéologique expédié en 1838 à l'ensemble des correspondants.
En 1839, les orientations de recherches qui avaient été demandées par Guizot à Lenoir, Mérimée, Le Prévost et Lenormant furent publiées à plus de 30 000 exemplaires et envoyées à chaque commune.
En 1851, Fourtoul réorganisa de nouveau le Comité et le regroupa en un seul, Comité de la langue, de l'histoire et des arts de la France, formé de trois sections : philologie, histoire et archéologie.
Le 22 février 1858, Gustave Rouland lui donna le nom de Comité des travaux historiques et des sociétés savantes, tout en instituant, dans les statuts, la fonction de commissaire responsable pour suivre l'impression des volumes et la vie des collections.
Il créa également, pour encourager les recherches, trois prix annuels de 1 500 francs chacun pour récompenser les sociétés ayant proposé au Comité les meilleurs mémoires.
Rouland relança également, la même année, une section des sciences sous la présidence de l'astronome Le Verrier. Cette section publia à partir de 1863 de grands textes d'histoire et de philosophie des sciences comme le Livre du trésor de Brunetto Latini et, plus tard, les œuvres complètes de Descartes et de Fermat.
Les collections furent alors redéfinies et trois grands « dictionnaires » de 86 livraisons entreprises :
- le dictionnaire géographique de la France (qui deviendra plus tard le dictionnaire topographique) ;
- le répertoire archéologique ;
- une description scientifique de la France dans les domaines géologiques, botaniques, météorologiques et statistiques ;
80 volumes seront publiés dans les vingt années suivantes dont la moitié pour les répertoires archéologiques et les dictionnaires topographiques.
Rouland prit une autre initiative qui modifiera jusqu'à la période actuelle les buts et les missions du Comité : il créa, en 1861, la première réunion des représentants des sociétés savantes à Paris. Cette initiative, qui rivalisait avec les congrès scientifiques des sociétés savantes mis en place par Arcisse de Caumont dès 1833, permettait au ministère de reprendre une tutelle active sur ces compagnies. Le premier congrès eut lieu en novembre 1861, il réunissait 500 représentants de sociétés savantes dans le grand amphithéâtre de la Sorbonne. 82 communications furent présentées, elles firent l'objet de 2 volumes de Mémoires tirés à 1 000 exemplaires.
Deux prix furent distribués, à Lucien Merlet pour son Dictionnaire topographique de l'Eure-et-Loir et à Henri d'Arbois de Jubainville pour son Répertoire archéologique de l'Aube. Le deuxième eut lieu à Pâques 1863 sous la présidence de Victor Duruy. Les congrès d'Arcisse de Caumont s'éteignirent en 1876. À partir de cette date, seuls les congrès du Comité rythmèrent la vie des sociétés.
La Revue des sociétés savantes, réorganisée en 1865 sous l'égide des sections du Comité, continua à paraître régulièrement, tirée à 800 exemplaires avec deux livraisons, l'une historique, l'autre archéologique, tandis qu'une nouvelle entreprise d'importance voyait le jour : la constitution, sous la présidence de Boislisle, d'une commission chargée de l'étude et de la publication des Mémoires des Intendants pour l'instruction du duc de Bourgogne.
Les dernières transformations importantes du XIXe siècle furent impulsées par Jules Ferry.
Le Comité fut rattaché en 1875 à la direction de l'enseignement supérieur.
Le 5 mars 1881 le Comité prendra sa dénomination actuelle de Comité des travaux historiques et scientifiques, divisé en 2 sections la première d'histoire, d'archéologie et de philologie, la seconde des sciences, il comptait 90 membres et 200 correspondants. Ses missions furent réorientées, principalement par un élargissement de ses champs de publication et la création d'une commission de publication dans chacune des sections.
C'est deux ans plus tard, le 12 mars 1883 que le Comité fut doté d'une réorganisation qui dura en l'état plus de 70 ans. Il fut alors divisé en 5 sections :
- histoire et philologie,
- archéologie,
- sciences économiques et sociales,
- sciences mathématiques, physiques, chimie et météorologie,
- sciences naturelles et sciences géographiques.
Une commission centrale fut créée, présidée par le ministre. Elle se réunissait tous les deux mois pour surveiller la publication du Bulletin du Comité, examiner les propositions de publications faites par les sections et proposer un rang d'impression, arrêter le programme des congrès et délibérer sur les encouragements à donner aux sociétés savantes et sur les reconnaissances d'utilité publique.
Outre le Bulletin du Comité et les "Documents inédits", les sections pouvaient proposer, comme cela s'était déjà réalisé dans le passé, la publication de tous autres documents ou travaux historiques et scientifiques. L'accent était alors mis sur l' « avancement des études scientifiques » dans toute l'extension du terme. Le rôle du Comité était désormais de refléter et de guider le développement scientifique dans toute sa complexité. Les statuts élargissaient d'autre part le rôle des commissions au sein des sections. Elles étaient désormais chargées de l'exécution de travaux particuliers, et permirent d'étendre le champ de recherche des sections. C'est ainsi qu'en février 1884 fut créée la commission de publication des documents archéologiques de l'Afrique du Nord, en 1898, après la création par Paul Doumer de l'École française d' Extrême-Orient, le Comité créa une commission archéologique de l'Indochine pour sensibiliser savants et grand public sur les problèmes de conservation et de restauration des grands monuments Cham et Khmer et essayer de dresser un inventaire des monuments indochinois.
En 1874 avait été créée la commission de l'exploration du Mexique chargée d'explorer le Mexique du point de vue historique, archéologique, ethnologique et linguistique sous la direction de Quatrefage, Chevreul, Milnes Edwards. Elle publia plusieurs ouvrages importants dont une grammaire et un dictionnaire de la langue nahuatl et la Description des ruines de Palenqué ainsi qu'une énorme somme botanique et minéralogique.
La section des sciences économiques et sociales créa quant à elle une commission de recherche et de publication des documents relatifs à l'histoire de l'instruction publique de 1789 à 1808, commission qui se transforma, en 1885, en commission de publication des documents relatifs à la Révolution de 1789.
La section des sciences économiques et sociales se vit alors confier la tâche d'étendre l'étude historique au-delà de la période de la Révolution française. Elle donna naissance à une sous-section d'histoire moderne.
En 1903, à l'instigation de Jean Jaurès, fut créée une commission de publication des documents d'archives relatifs à la vie économique de la Révolution française. Des crédits furent votés à cet effet.
Les statuts de 1883 apportaient au Comité une grande souplesse de fonctionnement et une prise plus importante sur la période contemporaine. Vidal de la Blache créa alors une section de géographie autonome.
La première guerre mondiale marqua un frein à l'activité du Comité pour un grand nombre de sections. Les congrès continuèrent toutefois de se réunir à leur rythme annuel mais l'élaboration des documents de travail fut freinée et parfois délaissée au profit de recherches personnelles et de publications individuelles.
En 1935, le service des missions et subventions fut confié à la Caisse de la recherche scientifique qui devint une section du CNRS en vertu de la loi du 21 janvier 1942, et, au lendemain de la dernière guerre mondiale, le Comité fut rattaché à la Direction des bibliothèques qui en prévoyait la liquidation. Beaucoup de membres étaient morts dans le conflit et certaines sections ne s'étaient pas réunies depuis plusieurs années. Julien Cain, de retour de captivité, fut nommé Directeur des bibliothèques et administrateur de la Bibliothèque nationale. Il refusa la liquidation de Comité et reconstitua en premier lieu les sections en cherchant à pourvoir au remplacement des membres disparus. Il dota ensuite le Comité de crédits suffisants pour reprendre immédiatement la tenue des congrès annuels et le financement de quelques publications. Les crédits décuplèrent entre 1945 et 1953 et sextuplèrent entre 1953 et 1965.
De nouveaux statuts vinrent en 1956 s'adapter à la nouvelle nature des travaux qui pouvaient lui être demandés. Le recrutement de nouveaux membres provinciaux et jeunes permit de décentraliser l'action du Comité et de retrouver un lien plus fort avec les sociétés savantes ainsi qu'avec les universités. 6 sections et une commission centrale furent alors créées :
- section de philologie et d'histoire jusqu'en 1715,
- section d'archéologie,
- section des sciences,
- section de géographie,
- section des sciences économiques et sociales,
- section d'histoire moderne et contemporaine.
Lors du rattachement de la Bibliothèque nationale au ministère de la Culture en 1981, le Comité fut séparé de celle-ci et resta attaché au ministère de l'Éducation nationale (Enseignement supérieur et recherche) alors sous la direction d'Alain Savary. De nouveaux statuts furent publiés en 1983, augmentant le nombre de sections et de membres. Ils créaient :
- La section d'histoire des sciences et des techniques,
- La commission de protohistoire et de préhistoire,
- La commission d'anthropologie et d'ethnologie françaises.
Pour rétablir le lien avec les sociétés savantes, ces nouveaux statuts prévoyaient que chaque section devait comprendre au moins trois responsables de sociétés (présidents ou secrétaires). Le Ministre déléguait alors à deux de ses directeurs la présidence des commissions centrales, d'une part le directeur de la Recherche, d'autre part le directeur des Bibliothèques et de l'Information scientifique et technique. Une nouvelle dynamique se mit alors en place, autour de dix pôles thématiques, publiant entre 20 et 30 ouvrages par an.
Quelques réformes dans les statuts virent, en 1991, la création d'un bureau et d'une fonction de vice-président du comité, ainsi que la limite à quatre ans du mandat des bureaux des sections et commissions. La commission de publication se réunit alors au moins trois fois par an pour entendre les rapports sur les publications et le calendrier de parution. La commission était également chargée de répartir les dépenses sur présentation des rapports du secrétariat général.
Le 9 février 2000, de nouveaux statuts ont permis de réorganiser les sections de redéfinir les missions. Une limite d'âge a été fixée à 70 ans a été fixé pour les membres des sections.
Les statuts actuels sont ceux définis par l'arrêté du 20 juin 2007 (http://cths.fr/hi/index.php#Statuts) portant création à l'École nationale des chartes d'un institut dénommé Comité des travaux historiques et scientifiques.
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